Résumé de recherche: DOHaD 2022: Expériences négatives de la petite enfance et sommeil

Résumé de la conférence

Le congrès mondial Développemental Origins of Health and Disease (DOHaD) est une conférence internationale qui a lieu tous les 2 ou 3 ans. Cette année, la rencontre a eu lieu du 29 au 31 août à Vancouver, en Colombie-Britannique. DOHaD Canada et Kids Brain Health Network (KBHN) étaient tous deux partenaires de la société internationale de DOHaD pour cette conférence. La DOHaD encourage la recherche sur les origines fœtales et développementales des troubles et des maladies. Des chercheurs de nombreux domaines présentent leurs résultats lors des conférences DOHaD, notamment les politiques de santé publique, la biologie du développement, la nutrition, la génétique, le cancer, les complications de la grossesse et de l'accouchement et les maladies cardiaques.  Cette année, plusieurs événements ont mis en lumière les perspectives et les expériences des peuples autochtones et des Premières Nations, tant au Canada que dans d'autres pays. Les thèmes du changement climatique et des inégalités sociales ont également été abordés dans des sessions tout au long de la conférence.

Session DOHaD 2022:

Le développement précoce du cerveau et les origines de la santé mentale du nourrisson

Présentation :

Origines sociales du risque développemental de la maladie mentale

Auteur de la présentation:

Judy L. Cameron, PhD

Département de psychiatrie

Université de Pittsburgh

Contexte

Il a été démontré que les expériences négatives dans l’ enfance (ENE) ont un impact à long terme sur la santé physique, la santé mentale, les relations interpersonnelles et la performance au travail/à l'école¹ . Parmi les exemples des ENE, citons les mauvais traitements subis pendant l'enfance, la négligence, la perte d'un parent ou le fait d'avoir des soignants ayant des antécédents de dépendance ou de maladie mentale. Les enfants ayant des troubles du développement sont plus susceptibles de subir des ENE que leurs pairs neurotypiques² . Les personnes ayant vécu quatre ENE ou plus dans leur enfance sont plus susceptibles d'avoir des problèmes de santé physique et mentale plus tard dans leur vie¹ . L'insomnie est un problème de santé courant chez les personnes ayant subi un traumatisme pendant l'enfance. La difficulté à s'endormir rapidement et l'incapacité à rester endormi sont toutes deux problématiques³ . Les traumatismes liés à l'enfance peuvent affecter la capacité à dormir profondément pendant la nuit jusqu'à l'âge adulte, et plus une personne a subi de traumatismes liés à l'enfance, moins elle dort⁴ . Les chercheurs s'intéressent au rôle que joue le sommeil dans l'impact à long terme des ENE sur la santé, et à ce qui peut être fait pour protéger la santé physique et mentale des personnes ayant subi un grand nombre d ENE.

Pourquoi les traumatismes de l'enfance provoquent-ils un mauvais sommeil?

Lorsque nous sommes exposés à des expériences stressantes pendant une longue période, notre corps libère des hormones qui nous " activent " à être tendus et à augmenter notre conscience de notre environnement (par exemple, l'hypervigilance). Lorsque ces expériences stressantes se produisent souvent et dès le plus jeune âge, ces hormones de stress peuvent avoir un impact sur le développement du cerveau^5,6 . Les personnes ayant subi un traumatisme dans leur enfance peuvent présenter des différences dans les structures cérébrales impliquées dans l'éveil, la mémoire et le traitement sensoriel, qui jouent toutes un rôle dans le sommeil^6,7 .

Présentation du DOHaD: Comment un meilleur sommeil peut-il aider les personnes ayant subi des expériences négatives dans l'enfance (ENE)?

Le Dr Judy L. Cameron étudie l'impact des ENE sur le développement précoce du cerveau. Ses recherches portent à la fois sur des études humaines et animales et ont permis d'explorer comment le moment des expériences stressantes et le(s) type(s) de traumatisme(s) vécu(s) peuvent interférer avec le développement de régions clés du cerveau. Cela entraîne ensuite des changements à long terme dans la santé mentale et physique. Par exemple, si un traumatisme survenu dans l'enfance survient alors que l'hypothalamus est en cours de développement, une personne peut avoir des problèmes de sommeil, car son rythme circadien (horloge biologique interne) est contrôlé par une partie de l'hypothalamus⁸ . Les changements dans l'amygdale peuvent avoir un impact sur les compétences socio émotionnelles et le traitement de la peur⁶ . Les recherches du Dr Cameron visent également à déterminer si certaines interventions peuvent protéger les individus des conséquences à long terme sur leur santé et leur santé mentale. L'idée est de voir si la promotion de "facteurs de protection", notamment des habitudes de sommeil saines, peut aider à prévenir les dommages à long terme sur la santé et le bien-être. Cette approche est testée dans le cadre d'un programme éducatif communautaire appelé travailler pour les enfants: développer des compétencesTM (Working for Kids: Building Skills) TM  , dont l'objectif est d'enseigner des compétences socio émotionnelles et de résolution de problèmes qui permettront aux enfants de réussir. En raison de son rôle important dans la régulation socio émotionnelle, des conseils pour développer des habitudes de sommeil seront inclus dans des modules supplémentaires de ce programme. Cette recherche est en cours et n'est pas encore prête à être publiée.

Comment savoir si vous rencontrez des difficultés à dormir?

Les gens peuvent avoir des problèmes de sommeil: a) ils ont du mal à s'endormir, b) ils se réveillent au milieu de la nuit, et/ou c) ils ne se sentent pas reposés après avoir dormi. Dans certains cas, des problèmes physiques comme l'apnée obstructive du sommeil sont à l'origine d'un mauvais sommeil. N'oubliez pas d'informer votre médecin si vous avez régulièrement un mauvais sommeil et si vous vous sentez fatigué même après vous être reposé.

Que puis-je faire de ces informations?

N'oubliez pas que les personnes ayant vécu une ENE peuvent améliorer leur sommeil et leurs capacités de régulation émotionnelle. Si vous pensez que vous ou l'un de vos proches avez des problèmes de sommeil liés à des expériences traumatisantes vécues pendant l'enfance, vous pouvez essayer ce qui suit :

Créez un horaire de sommeil régulier : essayez de vous coucher et de vous réveiller à peu près à la même heure chaque jour, même le week-end.

Favorisez la relaxation : avant de vous coucher, essayez de faire des étirements doux, des exercices de respiration, de la méditation en pleine conscience ou d'autres activités de soins personnels et d'apaisement.

Activité physique : Faites régulièrement de l'exercice au moins une heure avant le coucher pour favoriser un meilleur sommeil.

Demandez l'aide d'un professionnel : le fait de travailler sur un traumatisme avec un professionnel de la santé mentale qualifié peut permettre de réduire le nombre de terreurs nocturnes/flash-back qui interrompent le sommeil.

Consultez l'animation utile d'AIDE Canada sur le développement de meilleures habitudes de sommeil. Le scénario a été écrit par le Dr Penny Corkum, l'un des principaux chercheurs canadiens sur les difficultés de sommeil chez les enfants: développer de bonnes habitudes de sommeil: Vidéo animée.

Pour les parents d'enfants qui rencontrent des difficultés à dormir, lisez la trousse d'outils d'AIDE Canada qui contient des conseils utiles d’experts: les problèmes de sommeil chez les personnes ayant une déficience intellectuelle

Si vous êtes un parent avec un enfant qui bénéficierait de l'apprentissage de plus de compétences en matière de régulation émotionnelle, veuillez consulter la boîte à outils d'AIDE Canada: Boîte à outils d'autorégulation

Si vous rencontrez des difficultés à dormir sur une longue période, n'hésitez pas à en parler à votre médecin. En notant le nombre d'heures de sommeil que vous obtenez par nuit et la fréquence à laquelle vous vous réveillez au milieu de la nuit, votre médecin pourra décider de la meilleure façon de vous aider à mieux dormir.

Ressources complémentaires/lecture:

Travailler pour les enfants: développer des compétences^TM

De meilleures nuits, de meilleurs jours: Un programme pour les enfants ayant des troubles neurodéveloppementaux

Santé publique Ontario: Expériences négatives de l'enfance (ENE) - Interventions pour prévenir et atténuer l'impact des ENE au Canada (en anglais seulement)

Centre de contrôle des maladies: Expériences négatives de l'enfance (ENE) - (en anglais)

Références:

1. Hughes K, Bellis MA, Hardcastle KA, et al. (2017) L'effet des multiples expériences négatives de l'enfance sur la santé: une revue systématique et une méta-analyse. Lancet Public Health 2: e356-66.
2. Vervoort-Schel, J., Mercera, G., Wissink, I., Van der Helm, P., Lindauer, R., & Moonen, X. (2021). Prévalence et relation entre les expériences négatives de l'enfance et les facteurs de risque du contexte familial chez les enfants présentant une déficience intellectuelle et un fonctionnement intellectuel limite. Recherche en déficience intellectuelle, 113, 103935
3. Chapman DP, Wheaton AG, Anda RF, Croft JB, Edwards VJ, Liu Y, Sturgis SL, Perry GS. Expériences négatives dans l'enfance et troubles du sommeil chez l'adulte. Sleep Med. 2011 Sep;12(8):773-9.
4. Kelly Sullivan, Haresh Rochani, Li-Ting Huang, Diane K Donley, Jian Zhang, Les expériences négatives de l'enfance affectent la durée du sommeil jusqu'à 50 ans plus tard, Sleep, volume 42, numéro 7, juillet 2019, zsz087.
5. Teicher MH, Ohashi K, Khan A, Hernandez Garcia LC, Klengel T, Anderson CM, Silveri MM. La perturbation du sommeil intervient-elle dans les effets de la maltraitance infantile sur la structure du cerveau? Eur J Psychotraumatol. 2018 Mar 28;8(Suppl 7):1450594. doi: 10.1080/20008198.2018.1450594. PMID: 29844885; PMCID: PMC5965034.
6. Cameron JL, Eagleson KL, Fox NA, Hensch TK, Levitt P. Origines sociales du risque de développement des maladies mentales et physiques. J Neurosci. 2017 Nov 8;37(45):10783-10791. doi: 10.1523/JNEUROSCI.1822-17.2017. PMID: 29118206; PMCID: PMC5678010.
7. Ahmed-Leitao, F., Spies, G., van den Heuvel, L. et Seedat, S. (2016). Volumes de l'hippocampe et de l'amygdale chez les adultes souffrant d'un trouble de stress post-traumatique secondaire à des abus ou à des maltraitances dans l’enfance: Une revue systématique. Recherche en psychiatrie: Neuroimaging, 256, 33-43.
8. Marco EM, Velarde E, Llorente R, Laviola G. La perturbation du rythme circadien en tant qu'acteur commun dans les modèles de développement des troubles neuropsychiatriques. Curr Top Behav Neurosci. 2016; 29:155-181.